Lundi 15 février 2016 en plein après-midi, des jeunes à l’énergie débordante, flânent dans le tout nouveau centre commercial du centre-ville de Besançon, baptisé les « Passages Pasteur ». Leur présence dérange, paraît-il… D’abord, celle des consommateurs. Mais ces mauvais sujets sont suspects dès le départ, car ils ne consomment pas. Cela constitue un crime vis-à-vis des entreprises (la principale étant le constructeur de taules ‘Eiffage’) et de la mairie qui ont passé de nombreuses années à l’ériger. Ils estiment certainement que le temps est enfin arriver pour en tirer de juteux profits. Comprenez que si les responsables de la gestion de ce centre, la société « Klépierre » en tête et la municipalité, s’évertuent régulièrement à communiquer à la presse les chiffres de fréquentation et de consommation dans cet espace futuriste hyper-connecté, il est évident que ceci est lié au fait que le succès attendu n’est pas au rendez-vous. Ces promoteurs et gestionnaires ont misé gros sur cette énorme édifice et peinent à refourguer leurs cellules commerciales plus de 6 mois après son inauguration.
A cet agacement des puissants s’est ajoutée une autre épine dans leur pied : la présence d’indésirables, qui a immédiatement mobilisé les vigiles présents, D’ordinaire, l’acceptation et la résignation face à ceux qui fouillent une partie de la vie des gens et protègent par la violence les richesses d’une minorité sont monnaie courante, ce qui ne fût pas le cas cette fois-ci. Les jeunes se sont immédiatement rués sur ces chiens de garde, les ont roués de coups et deux des leurs ont fini blessés, dont l’un sérieusement (il aura une ITT de quelques jours). Les flics – notamment la BAC – ont immédiatement envahi le centre commercial pour rappeler aux gentils consommateurs qu’ils peuvent tranquillement continuer à vaquer à leurs loisirs superficiels.
« Pas question de laisser des jeunes cons casser tout ça….», s’est fâché le maire PS lors d’une réunion de crise le lendemain de “l’agression” aux côtés de tous les services de police existants. Les mesures sont immédiates. Outre le renforcement du nombre de patrouilles de police autour et à l’intérieur du centre commercial, le directeur de ‘Klépierre’, Frédéric Robert, a tout de suite annoncé l’embauche de plusieurs vigiles pour sécuriser le centre. Par ailleurs, il a annoncé doubler voire tripler le nombre de vigiles les mercredis et samedis après-midi, périodes de “grande influence”.
Ceci dit, cet épisode sur-médiatisé ne peut en aucun cas faire oublier le harcèlement policier à l’encontre des pauvres et indésirables du secteur de la place Pasteur, qui dure depuis de nombreuses années : déjà en 2011, les flics municipaux harcelaient quotidiennement les zonards de la place en distribuant à la pelle des amendes à des insolvables, alors que le centre commercial était encore en chantier. Nul doute que ces méthodes visaient à les dissuader de revenir, mais c’est de plus en plus difficile pour le pouvoir de cacher la misère derrière leurs innombrables projets de restructuration urbaine. La mendicité au pied d’un espace où s’accumule la marchandise et la circulation du fric fait tâche pour le maire, qui rivalise depuis des années avec le maire de Dijon en matière d’embourgeoisement (le tramway ayant une part importante dans la construction de cette ville de riches).
Alors qu’un mouvement social dure depuis bientôt deux mois, ce temple du capitalisme mériterait bien que nous y fassions un tour, seul ou accompagné, en manif sauvage comme en explorateur nocturne…. Histoire de leur signifier simplement notre dégoût que leur monde nous inspire….