Un été de révoltes.
Alors que la fin de l’année a connu des troubles sociaux qui ont donné du fil à retordre au pouvoir, l’été 2016 a été marqué par des révoltes enflammées contre ce monde de misère et d’oppression. Elles ont ciblé en premier lieu ceux qui exercent la violence du pouvoir la plus manifeste, à savoir les flics et les gendarmes. Si certains partent en vacances, d’autres continuent à subir l’univers carcéral des quartiers-ghettos. Mardi 19 juillet à Beaumont-s/-Oise dans le Val-d’Oise (95), Adama Traoré n’a pas survécu à son interpellation par les gendarmes. Pour dissimuler sa mort par étouffement aux mains des bleus, l’État a immédiatement parlé de « problèmes cardiaques […] problèmes respiratoires […] infections pulmonaires », etc… Face à ce macabre scénario que le pouvoir a orchestré avec la complicité des médias à ses ordres, et qui se répète à chaque fois qu’il y a un mort entre les mains de la police, plusieurs nuits de révolte se sont succédé à Beaumont et à Persan lors desquelles des bâtiments municipaux et de l’État (commissariats, bibliothèques, garages de véhicules municipaux) et des infrastructures du capital (stations-service, supermarchés, etc…) sont partis en fumée et/ou ont eu leurs vitres brisées. La révolte, qui parle à toute âme insoumise et rebelle, s’est même propagée à l’intérieur de la prison d’Osny (refus d’obéir aux matons et incendies) et dans certains départements, comme par exemple à La Courneuve (Seine-St-Denis), dans le quartier du Val-Fourré à Mantes-la-Jolie (Yvelines), où les flics ont connu plusieurs nuits de représailles de la part de groupes de jeunes. Ces attaques contre les institutions et infrastructures de cette société sont la preuve même qu’aucune justice n’est possible dans ce monde, tant qu’il n’est pas anéanti. « Réclamer que justice soit faite », c’est demander à l’État de condamner un assassin en uniforme, lui-même mandaté pour appliquer l’ordre, ce qui revient à exiger que le pouvoir se condamne lui-même. C’est compter sur lui pour appliquer une quelconque justice, qui a toujours été et est au service des riches et des dominants. Quand bien même le meurtrier assermenté serait reconnu coupable d’homicide volontaire, les conditions imposées par ce système d’exploitation et d’oppression continueraient à exister.
A Besançon, dans la nuit du 14 au 15 juillet, une révolte a explosé à la face des oppresseurs : les contrôleurs, de plus en plus présents en fin de service sur les lignes du tramway (et notamment dans les quartiers populaires), ont récolté pour la première fois la rage qu’ils sèment chaque jour en harcelant les pauvres sans titres de transport. Un de ces uniformes de « Besançon Mobilités » se souviendra longtemps de cette nuit, puisque le jet de pavé qui a traversé la fenêtre de son véhicule l’a mis K.O. pour plusieurs semaines. Plusieurs tramways et bus ont été caillassés, du mobilier urbain a été dégradé, des barricades enflammées sur les voies ont contraint la société de transport Ginko à interrompre le trafic jusqu’au lendemain 10h. Les flics, toujours là pour défendre cet ordre fondé sur le fric et la marchandise, ont aussi subi la colère des rebelles par des caillassages. Et pour couronner cette belle soirée, aucune personne n’a été interpellée.
L’État sort chaque jour des lois dégueulasses.
De la loi « travaille ! » au « service civique obligatoire ».
Les quatre mois de lutte enragée contre la loi « travail » ont mis à mal la société et ses sbires armés, ce qui a amené le pouvoir à se venger contre les rebelles, comme le déchaînement répressif a pu nous le montrer (selon un bilan officiel du ministère de la justice publié le 7 juillet 2016, 896 personnes ont été placées en garde à vue et 32 condamnées à des peines de prison ferme depuis le début du mouvement. Parmi ces gardes à vue, 520 concernaient « des violences contre les forces de l’ordre », 188 des « attroupements armés » et 89 des « dégradations »). Il y a eu des blocus de lycées et de facs, des blocages de l’économie en ses points névralgiques, des sabotages ainsi que des destructions de tout ce qui assure l’exploitation et l’oppression. Mais il ne faut bien sûr pas s’arrêter en si bon chemin (vers l’insurrection). Et les raisons de s’engouffrer dans ces chemins si peu explorés sont légion, car chaque jour le pouvoir aménage et renforce son assise par des lois tout aussi immondes les unes que les autres. Le service militaire n’existe plus depuis longtemps, mais l’État prévoit pour l’année 2016-2017 sa version modernisée et adaptée aux besoins du marché et du capital. Le gouvernement compte bien enrôler chaque jeune, à l’année de ses 18 ans, pour le faire bosser tout l’été dans une entreprise, assoc’ à la con ou institution considérée comme « d’utilité publique » (comme l’armée, la gendarmerie, la police, l’éducation nationale, etc…). Ce nouveau service national se complétera jusqu’à 25 ans par six autres mois de stage (à réaliser en une seule fois ou en deux fois trois mois). C’est un programme de rêve pour les patrons et l’État, qui lâcheront quelques miettes à l’exploité (entre 400 et 600 balles) au bout de la mission accomplie. Bienvenue dans le monde des adultes, où on apprend à trimer des journées entières pour de l’argent de poche, à endurer les conditions de merde du travail, les caprices du patron et des petits-chefs, les horaires et cadences qui lobotomisent les esprits, réduisent à néant toute autonomie et énergie. Dès 18 ans, c’est le modèle idéal du bon larbin des possédants qu’il s’agit de transmettre. Au-delà du fait de pourrir les jeunes esprits par le goût de l’exploitation et de la compétition, l’idée est de dresser et de formater le jeune afin qu’il devienne le parfait citoyen tant attendu par l’État, en lui inculquant le patriotisme, le respect des lois, ainsi qu’une mentalité de mouton et de poucave…
Quant à nous, réussirons-nous à rompre avec l’impasse de la résignation et à prendre nos vies en main, en généralisant la rébellion contre cet avenir toujours plus merdique que les dominants nous annoncent ?